Brandon Brookbank

Brandon Brookbank

Salle 2

Kyle Alden Martens

Portable closets

EXPOSITION /
7 SEPTEMBRE AU OCTOBRE 13, 2018

VERNISSAGE /
VENDREDI 7 SEPTEMBRE, 17H - 00H

PERFORMANCE / 
VENDREDI 7 SEPTEMBRE, APRÈS 20H

PRÉSENTATION D'ARTISTE /
SAMEDI 8 SEPTEMBRE, 15H

Cette exposition est aussi présentée dans le cadre d’Art Pop (26 au 30 septembre 2018).
www.popmontreal.com

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Portable Closets (Placards portables) est une pièce remplie d’objets sculpturaux, la plupart desquels ressemblent à des vêtements, bien que se démarquant par des tailles et des configurations non conventionnelles. Il pourrait s’agir de calembours visuels déguisés en œuvres d’art, avec des allusions sexuelles à peine camouflées sous forme de cadenas de journaux intimes bon marché. Des chaussettes sont remplies de graines pour oiseaux, et de tout petits chandails à col roulé sont suspendus comme des bites flasques et non circoncises, formant une sorte de tapisserie. Encore plus énigmatiques sont les vêtements miniatures qui sont incorporés à l’une des nombreuses paires de sandales en bois posées sur des podiums. Ces chaussures sont autant de jeux étranges, avec leurs surfaces qui ressemblent à de vieux casse-têtes en bois.

Fils d’un menuisier et d’une couturière pentecôtistes de la Saskatchewan, Alden Martens a façonné ces objets avec grande maîtrise. Et, de toute évidence, ces sculptures ont été utilisées. De légères éraflures se trouvant sur chaque objet ainsi qu’une vidéo présentée dans l’espace en témoignent. La vidéo montre de jeunes hommes aux tenues simples jouant avec ces objets — une scène homosociale qui évoque les écrans de sélection de personnages au début de certains jeux vidéo. En parallèle, à des moments précis, des personnes désignées interagissent avec les sculptures en direct sur leurs plateformes, suivant une série d’instructions vaguement structurée afin de « jouer » à chacun de ces jeux. Leurs propres vêtements sont génériques, presque anodins — aussi propres et cliniques qu’une tenue de spa convenue. Il ne s’agit pas de performances bienséantes et mises en scène, mais plutôt d’actes plus intimes présentés par les joueurs.

En personne comme dans la vidéo, ces non-performeurs performatifs se livrent à une étrange forme d’unité — un jeu social curieux qui se déploie comme une fiction en direct et en temps réel. Ils demeurent silencieux lors de ces performances, aussi muets que la sobriété de leurs tenues. Ni ces individus ni leurs actions n’en disent long sur leur monde intérieur : ils n’expriment aucun désir et présentent très peu de signes identitaires. Plutôt, ce qu’ils exhibent individuellement et en tant que groupe ne fait qu’allusion à l’identité de ces joueurs, cachée entre ce qui est connu, vu et entendu — et obscurcie par les portes du placard. Ces scènes peuvent paraître superficielles, mais elles sont à la fois tout aussi intimes que des films de famille.

On pourrait songer à cette description du « placard » formulée par Eve Kosofky Sedgwick il y a trente ans, ce seuil inévitable auquel doivent faire face ceux d’entre nous qui gravitent en marge des normes sexuelles de la société. Kosofky Sedgwick a su reconnaître le dilemme du placard : on est contraint d’en sortir et de révéler sa nature « véritable », et ce faisant on se codifie comme étant socialement déviant, dans une « révélation à la fois obligatoire et interdite * ». Selon Alden Martens, les « placards portables » décrivent peut-être plus précisément les outils employés par les personnes queer afin de parcourir le monde social — dissimulant et divulguant qui nous sommes d’un moment à l’autre. Tout comme les sculptures étranges dans cette pièce, les codes identitaires peuvent être recomposés ou déconstruits, de la même manière que les signifiants instables qui définissent les séparations arbitraires entre homme et femme, homo et hétéro.

Ne cherchez pas de sens fixe ici, il n’en existe aucun.

- Mikhel Proulx (traduit par Simon M. Benedict)

 

* Eve Kosofsky Sedgwick, Epistemology of the Closet, Berkeley, University of California Press, 1990, p. 70 [traduction libre] 

 

Kyle Alden Martens (né en 1989) est un artiste interdisciplinaire basé à Montréal. Il a complété un baccalauréat en beaux-arts, spécialisation Intermedia, au Nova Scotia College of Art and Design en 2015. Il a travaillé en tant qu’administrateur artistique (NS Centre for Craft and Design), monteur d’expositions (Anna Leonowens Gallery), et assistant de galerie (Art Gallery of Swift Current). Martens a présenté ses œuvres au Khyber Centre for the Arts, à Eyelevel Gallery, au Centre for Art Tapes à Halifax, en Nouvelle-Écosse, et à Stride Gallery à Calgary, en Alberta. Vous pouvez le trouver en ligne en train d’étudier le français ou au travail dans son studio, préparant de sa prochaine exposition individuelle à Eastern Edge Gallery, à Saint-Jean (Terre-Neuve).

J’aimerais remercier mon partenaire, Brandon Brookbank, pour son appui continu et éclairant, la production des images promotionnelles, sa participation à la performance filmée et son aide au montage de l’exposition; Cason Sharpe et Cameron Cummings pour avoir joué dans la vidéo et Maddie Mcneely pour son soutien technique durant le tournage. Merci à Arts Nova Scotia pour le soutien à la production des sandales et des vêtements de cette exposition. Merci au programme Jeunes Volontaires d’Emploi-Québec pour le financement de la vidéo. Merci à ma mentore Anna Hawkins pour son accompagnement doux et édifiant. Merci à l’Atelier CLARK pour la conception de jolis socles. Merci à l’équipe du Centre CLARK d’avoir vu le potentiel de mon travail et de m’avoir accordé cette opportunité.